En hypnose clinique les termes d’imagerie ou de visualisation sont synonymes. Dans le domaine de la communication et de la psychologie clinique, l’imagerie mentale vient décrire la représentation cérébrale de la perception d’une figure-fond : un objet physique dans son contexte ou une analogie dans son cadre sémantique.
La conscience, c’est la mémoire du « je »
Beaucoup de philosophes se sont penchés sur la définition de la conscience. Les phénomènes comme la mémoire, la représentation, l’imagerie, le rêve ou la visualisation construisent la conscience et contribue à son évolution. C’est pourquoi il importe de bien utiliser, de bien profiter de ces phénomènes, de ces capacités. La visualisation d’imagerie mentale est un formidable outil pour celui ou celle qui veut explorer les fondements de sa conscience. Leur utilisation en hypnose clinique favorise l’accès aux représentations des affects, des émotions, des objectifs, motivation et sources de satisfaction.
La représentation est une réentrance ?
En philosophie, la « représentation » s’apparente au concept de « réentrance » des neuro-sémanticiens de la conscience, comme Gérald Edelman, qui cherchent à répondre à la question : « Qu’est-ce qui fait de nous des êtres doués de conscience, capables de se souvenir ? » La réponse se trouve dans la cytoarchitecture de la mémoire sémantique. Les cellules neuronales impliquées dans la mémoire forment invariablement des boucles de rétroaction, des systèmes de contrôle. Ce que nous percevons subjectivement comme la conscience d’un souvenir est le résultat de boucles de rétroaction, contrôlant des signaux de perception pour leur assigner une valeur affective, une catégorie cognitive. C’est par la voie de réentrance que chaque activité électrique de chaque neurone se voit attribuer une assignation, une signification, une interprétation, une représentation, selon l’histoire, le contexte et les autres construits ou filtres représentatifs de la conscience qui interprète ces signaux. La même nociception sera interprétée comme une punition, une torture cruelle ou un signe de guérison, selon le filtre mis en place dans la conscience. La visualisation ou l’imagerie sera donc tributaire de ces filtres et à l’inverse, le travail fait pour reconstruire des représentations positives aura des retombées bénéfiques pour tout le champ de conscience, qui s’en trouvera apaisé.
Lorsqu’on range un objet dans une boite, on sait que l’objet s’y trouve encore, même sans ouvrir la boite. À la base du développement cognitif, Jean Piaget nommait cette capacité « la permanence de l’objet ». C’est sur cette base que se développe la conscience, la capacité de raisonner, le « Je pense donc je suis » de Descartes. Les orthophonistes considèrent la permanence de l’objet comme un précurseur de la communication.
L’explication simplifiée, c’est qu’une fibre nerveuse réentrante vient « re-présenter » au cortex visuel l’image de l’objet, pour créer un filtre perceptuel liant la boite et l’objet, si bien qu’on puisse « voir » cet objet dans la boite, comme si on voyait en rayon x. Nous visualisons l’objet, l’imaginons et en faisons une image mentale. La conscience est donc une image mentale, une représentation de nous même dans un contexte réel, une boite. Nos perceptions sont limitées par cette boite, mais nos re-présentations nous aide à nous construire des filtres de la réalité.
La perception s’organise sur la base d’une ségrégation figure-fond, comme on le voit dans cette illustration classique illustrant tant de manuel de psychologie à la légende invariable : Est-ce une vieille ou une jeune?
Travailler en thérapie sur notre imagerie mentale, c’est travailler sur la construction ou la reconstruction de ces filtres. La façon dont on se re-présenter dans la visualisation et l’imagerie mentale nous en dit long sur nos aspirations, nos ambitions, sur l’estime que l’on se porte à soi-même.
Les applications de l’imagerie mentale

On utilisera donc l’imagerie et la visualisation comme techniques de mémorisation, mais aussi en psychologie sportive pour augmenter les performances athlétiques, faciliter la coordination musculaire complexe. Tel que démontré à l’émission Testé sur des humains du 11 avril 2016, Rémi Côté, psychologue utilise les techniques de visualisation et d’autohypnose pour aider Jean-Michel Anctil à faire face à son acrophobie. Autre exemple, lors de la couverture médiatique des jeux olympiques, il n’est pas rares de voir des skieurs « revoir » mentalement leur parcours en piste, les yeux fermés on les voit se pencher à gauche, à droite, se pencher, plier un genou pour éviter un obstacle. Ces skieurs revoient mentalement toute la décente, sans rien laisser au hasard. Lorsque le signal sonore indique le moment du départ, le skieur a « mentalement » franchit plusieurs fois le fil d’arrivée!
En psychothérapie et en hypnose clinique on utilise aussi l’imagerie et la visualisation pour faciliter l’exposition et la désensibilisation. Par exemple, si une personne a pour objectif de diminuer son anxiété lorsqu’elle s’exprime en publique, on peut lui demander de se visualiser, de s’imaginer à parler devant un public! Cette exposition, même en imagination, aura pour effet de stimuler le patient, l’encourager à trouver une voie d’adaptation, une acceptation, un apaisement, une régulation de sa réponse émotive. Evidemment, la visualisation sera beaucoup plus approfondie, riche et réaliste sur les plans perceptuels, si elle se fait en état de transe hypnotique. C’est pourquoi les psychologues qui utilisent l’hypnose clinique intègrent presque systématiquement des suggestions de visualisation à leurs scripts.